« L’état de nos routes » de Johanne Fournier : un petit livre à l’écriture ciselée

« L’état de nos routes » est publié chez Leméac. Photo : Romain Pelletier

Publié en pleine pandémie de la COVID-19 en septembre 2021, le deuxième tout petit livre de la cinéaste et autrice matanaise Johanne Fournier « L’état de nos routes » est passé inaperçu pour bien des gens.

Pourtant, cette plaquette de 88 pages parue aux éditions Leméac méritait un meilleur accueil. Il fait énormément penser à un scénario de film, qu’elle n’aurait pas encore tourné.

Tout part d’une fugue avec un premier amour

Ces récit débute par une fugue de jeunes de 15 et 17 ans, de Matane en direction de Gaspé, à la fin des années 60, de leur retour à Matane, du départ de l’adolescente pour les études, de son retour dans son pays natal.

Johanne Fournier ne situe pas les événements dans le temps, ni ne nomme, à l’exception de sa fille, les personnes qui défilent dans sa vie, son compagnon de voyage et son premier amour, les membres de sa famille et ses proches, le chef de police, le député, le directeur du collège, le clerc de Saint-Viateur qui enseigne le latin…

Évoquant plein d’images, l’écriture ciselée de Johanne Fournier rend de fort belle façon quelques lieux de Matane, surtout le vieux port et son centre commercial, de même que l’ancien emplacement sous la troisième phase de la Résidence des Bâtisseurs sur la rue principale.

Comme cette « revenue » l’écrit, les trois films qu’elle fera après son retour en Gaspésie seront remplis de lieux fermés l’hiver, le long de cette route aimée qu’est la 132, de gens emmitouflés dans le froid.

Deux marqueurs sur ma ligne du temps

« J’ai commencé à raconter cette histoire, écrit Johanne Fournier dans sa présentation, pour ne pas la perdre et parce qu’il y avait à ce moment deux marqueurs sur ma ligne du temps : cinquante années que j’avais fugué avec ce jeune homme et vingt-cinq qu’on s’était retrouvés, lui et moi, et tentions, depuis, de bâtir un amour.

Il m’a semblé que cette histoire valait d’être déposée en-travers des falaises, des crans, des couches de pierre et de sédiments, que ces questions de revenir au pays natal, de risquer d’y vivre, méritaient mon attention.

Quand on est cinéaste, l’écriture n’est jamais la finalité, l’écriture sert l’écriture du film. Je suis une fille de salle de montage et de coulisses, encore étonnée d’être publiée, étonnée et reconnaissante. » 

Johanne Fournier, d’abord cinéaste, puis autrice. Sa première publication « Tout doit partir », Leméac, en 2017, lui a valu de remporter le prix Jovette-Bernier. Photo : Romain Pelletier