PORTRAIT | Marcel Bélanger, l’homme impliqué au grand coeur

Marcel Bélanger se tenant devant l'affiche du Marigot. Crédit photo : Arsenal Media (Claudie Arseneault)

Récipiendaire de la médaille de mérite exceptionnel du lieutenant-gouverneur du Québec, Marcel Bélanger est connu pour sa grande carrière communautaire dans le milieu de la santé, et plus particulièrement, sa générosité sans limites et son humanité extraordinaire. Retour sur sa vie et sa carrière, et ce qui l’a amené à où il en est aujourd’hui.

En septembre, Marcel Bélanger a eu la chance de rencontrer le lieutenant-gouverneur du Québec en personne, l’honorable Michel Doyon, qui s’est extasié à propos des personnes impliquées qui donnent inconditionnellement, telles que M. Bélanger lui-même.

Né à Mont-Joli en 1947, ce sont ses parents qui lui ont donné l’exemple de bonté et de générosité envers les autres depuis sa tendre enfance, et à l’origine de sa sensibilité et de son empathie. « Mes parents étaient très généreux, autant auprès de leur environnement que de leur famille, qu’au niveau social et dans leur communauté », a-t-il affirmé. « Par exemple, ma mère m’amenait aux oeuvres de la Sainte-Enfance, où on allait déposer des vêtements. »

À l’époque, Mont-Joli était un village ferroviaire relativement pauvre. Si sa mère était une femme très impliquée dans sa communauté, son père, lui, était commis voyageur et vendeur de lingerie pour femmes, en plus d’être considéré comme « le riche » du village. Adolescent, Marcel avait initialement songé à devenir prêtre, et considérait appliquer pour la Fabrique de Joliette. Finalement, il a fréquenté le Collège classique de Matane comme pensionnaire.

Les valeurs de solidarité et d’entraide ont toujours été déterminantes pour Marcel Bélanger. « Je pense que j’ai appris ces valeurs lorsque j’étais dans les scouts, quand j’avais 10 ou 11 ans. Les scouts prennent plusieurs contrats communautaires et sociaux, et j’étais un gars de ‘gang’ alors je participais à tout », a-t-il lancé. À l’époque, le clergé était celui en charge des causes philanthropiques, et les enseignements religieux amenaient les enfants à développer des vertus. « Et pour moi, celle qui m’a collé à la peau, héritée de mes parents, c’est la charité. »

Après le collège, Marcel suit des cours au Cégep de Rimouski, récemment ouvert depuis 1967, où sa vie étudiante a réellement pris son envol. S’intéressant à plusieurs matières et expertises, il se spécialise en littérature québécoise, programme à lequel il applique à l’Université Laval. À sa première année à Québec, il assiste à un cours de contes et légendes du département de folklore. Il tombe en amour, et enchaîne les cours en ethnographie. Finalement, il obtient sa maîtrise en ethnographie, grâce à laquelle il obtiendra son premier emploi à Matane.

Marcel Bélanger se tenant à droite de l’honorable Michel Doyon, montrant sa médaille. Photo courtoisie de la Ville de Matane.

« Quand j’ai eu le bonheur de revenir à Matane en 1973 après l’université, j’ai été engagé par la personne qui m’avait remercié de mes services au collège classique », a-t-il enchaîné. Plus jeune, il avait été renvoyé du collège avant de poursuivre ses études. « J’étais un gars de gang, et j’avais beaucoup d’amis. On n’était pas toujours dociles, et j’étais parfois un peu trop franc », a-t-il rigolé. Puis, cette même personne l’a embauché pour devenir le nouveau animateur socioculturel du nouvellement inauguré Cégep de Matane, sachant qu’il était bon leader.

Il est resté animateur socioculturel au Cégep de Matane de 1973 à 1980. « Je m’y suis très bien intégré parce que j’étais un amateur de sport et ça a été le début de belles amitiés », a-t-il expliqué. En effet, à sa première pratique de baseball, alors qu’il courait, il est soudainement tombé dans l’étang au fond de la cour de sport. Et lorsqu’il est sorti de l’eau décrite comme « boueuse et visqueuse », ses coéquipiers le regardaient d’en haut, pliés en quatre.

La carrière philanthropique de Marcel Bélanger s’est officiellement enclenchée lorsqu’il a participé au projet d’implantation de la première garderie à Matane du CLSC en tant qu’animateur socioculturel au cégep. « J’ai assisté aux premières assemblées de la garderie, et c’est là que j’ai connu tous ces gens tellement impliqués que je ne connaissais pas avant », a-t-il énoncé. « J’ai tout de suite repéré des personnes super intéressantes, qui prenaient soin de la communauté et du développement des services communautaires. »

La une de La Voix Gaspésienne, 18 février 1970. « Collège de Matane : CEGEP. » Photo courtoisie de la Société d’histoire et de généalogie de Matane.

C’est aussi au Cégep de Matane qu’il a pris de l’expérience dans le milieu du divertissement, car il devait organiser des spectacles et des pièces de théâtre pour la communauté étudiante. Un événement l’a particulièrement marqué, qui est la rencontre de l’auteur-compositeur-interprète Félix Leclerc. Il était venu donner un spectacle à Matane, mais juste avant sa performance, il a passé l’après-midi avec Marcel. « J’ai écouté le sage, le poète, le philosophe… Ce fut réellement un moment de prédilection dans ma carrière d’animateur. »

À son départ du cégep en 1980, il a par la suite intégré l’équipe du CLSC de Matane pour y rester jusqu’à sa retraite en 2006. Il a commencé comme coordonnateur de programme, pour ensuite évoluer au poste d’agent d’information, et finalement, en tant qu’organisateur communautaire. Parallèlement, il fut animateur bénévole à la télévision de COGECO pour des émissions d’intérêt communautaire, en réalisant des entrevues avec du personnel du CLSC.

C’est pendant toutes ces années, sur une période de plus de 35 ans, que l’animateur est devenu complaisant pour plusieurs organismes. Il a participé à la Croix Rouge, au club de services Les Lions, à l’Association coopérative d’économie familiale (ACEF), aux Journées de la jonquille pour le cancer, et plus encore. « J’étais facilement recrutable, parce que j’avais de la difficulté à dire non », a-t-il avoué.

En 1992, M. Bélanger a dirigé l’assemblée de fondation de la Société de gestion de la rivière Matane (SGRM) avant de devenir administrateur quelques années plus tard. « Une fois de plus, j’ai rencontré des personnes inspirantes et surtout, soucieuses de l’environnement et de la protection de la ressource saumon, comme moi », lance-t-il. Il s’est impliqué également auprès des campagnes de Centraide depuis 1981, et y prend part encore aujourd’hui.

Pourquoi tient-il le Centraide du Bas-Saint-Laurent autant à coeur? « Parce que je connais les besoins des organismes communautaires, mais aussi des gens auxquels ils viennent en aide. Personnellement, je pense avoir été chanceux dans la vie, mais ce n’est pas le cas de tout le monde dans notre communauté. Il y a des gens bien moins nantis. » Plus encore, il considère que le Centraide est un moteur au niveau de la dynamique du milieu matanais. « Nous en avons besoin. Et ce n’est pas juste d’aider, mais d’amener les gens à s’aider eux-mêmes. »

Mais sa plus grande satisfaction de sa carrière philanthropique, croit-il, est son implication dans le milieu de la santé mentale. D’abord, il animait les rencontres du groupe Parathaise, offert aux parents d’enfants qui souffraient de maladie mentale sévère. Il a existé pendant une dizaine d’années jusqu’à une restructuration du milieu de la santé. Puis, cela fait plus d’une vingtaine d’années qu’il est membre du conseil d’administration du centre Le Marigot, un organisme alternatif dédié aux adultes ayant des problèmes de santé mentale. Il a eu le chance d’y développer des amitiés importantes, et il se sent très proche de cette équipe tissée serrée.

L’intervenante Vicky Truchon et Marcel Bélanger dans les bureaux du centre Le Marigot. Crédit photo : Arsenal Media

À sa retraite, il a décidé d’opter pour deux organismes auprès desquels il continuera de s’impliquer : Le Marigot, évidemment, ainsi que la Société de gestion de la rivière Matane. Il est autant bénévole qu’administrateur à part entière pour ces deux organismes, et en est très fier. « Aider les autres, c’est voir des personnes se développer en tant qu’être humain. En aidant les autres, tu t’aides toi-même lorsque tu vois les résultats concrets qui s’opèrent au sein d’une communauté. La paye, c’est de voir toutes ces belles personnes réussir », dit-il.

Présentement, Marcel Bélanger est en train d’écrire un article pour la revue d’histoire de la Société d’histoire et la géologie de Matane. Et dans un futur proche, il songe à quitter Matane avec sa conjointe pour aller rejoindre ses filles, dont la plus vieille est cardiologue à l’hôpital Le Gardeur, ainsi que ses petits-enfants et ses frères et soeurs, qui habitent tous dans le Centre-du-Québec. 

Juste à penser à quitter sa communauté de Matane, Marcel s’émeut. « Je suis né à Mont-Joli, je vis à Matane. C’est difficile, c’est comme s’enlever de ses racines… Il va falloir que j’accepte d’être coupé de ça éventuellement », a-t-il énoncé sur un ton las. « Mais je suis tellement chanceux d’avoir été entouré de personnes aussi incroyables, aussi humaines, en plus d’être encore en santé à 73 ans. Et surtout, je suis chanceux de pouvoir regarder en avant. »